PEUPLES AUTOCHTONES : « Les Canadiens sont solidaires avec nous et veulent voir des changements »

TeresaEdwardsCIVICUS s’entretient avec Teresa Edwards, directrice exécutive et conseillère juridique de la Fondation Legacy of Hope (LHF), sur les réactions aux preuves récentes d’atrocités commises à l’encontre des peuples autochtones du Canada dans le cadre du système des pensionnats du pays, et sur les efforts de la société civile pour obtenir vérité, justice et réparations. La LHF est une organisation caritative autochtone nationale à but non lucratif qui cherche à éduquer le public, à sensibiliser, à favoriser l’empathie et à inspirer l’action autour des questions d’inégalité, de racisme et de violations des droits humains commises contre les peuples autochtones du Canada.

 

Qu’est-ce qui a changé pour les peuples autochtones du Canada depuis que les autorités ont commencé à reconnaître l’existence des tombes d’enfants dans les pensionnats ?

En tant que peuples autochtones, nous avons toujours été informés de ces atrocités par les survivants, nos familles et nos communautés depuis des générations. Nous avons également soulevé ces questions auprès des autorités pendant des années, sans réponse ou presque.

Depuis que les restes des enfants ont commencé à être déterrés en mai, et que les Canadiens s’en rendent compte grâce aux preuves ADN indéniables et irréfutables découvertes autour des écoles, nous avons reçu une vague de soutien que nous n’aurions jamais pu imaginer. Nous avons été contactés par des particuliers, des familles, des fondations, des élèves d’écoles primaires et secondaires, des syndicats d’enseignants et de nombreux autres syndicats, des petites, moyennes et grandes entreprises, des agents de police et des agents correctionnels, des paroissiens, et la liste est encore longue - tous demandant ce qu’ils pouvaient faire pour aider ou contribuer à la réconciliation d’une manière ou d’une autre.

Le personnel de la Fondation Legacy of Hope travaille sans relâche depuis le mois de mai pour mener à bien nos projets, expositions et programmes habituels, tout en répondant aux milliers de demandes de renseignements que nous recevons chaque jour, et cela ne s’est pas arrêté. Nous avons embauché davantage de personnel et de travailleurs occasionnels afin de nous assurer que nous ne manquons pas une occasion de produire davantage de ressources éducatives, d’expositions, de programmes d’études, d’ateliers et d’autres opportunités d’engagement avec le public. C’est incroyablement encourageant de voir que les Canadiens ont tellement de cœur en prenant connaissance de la véritable histoire du Canada !

Quelles actions les groupes de la société civile autochtone ont-ils entreprises pour mettre en avant les problèmes d’abus et d’exclusion, notamment à l’occasion de la fête du Canada et de la campagne électorale ?

Depuis des décennies, les groupes autochtones tentent de sensibiliser l’opinion publique aux nombreuses injustices qui touchent l’ensemble de nos nations, ainsi qu’aux problèmes particuliers de chaque territoire, mais la plupart des médias grand public et des gouvernements ne s’y intéressent guère. Lorsque les histoires concernant les dépouilles des enfants ont fait le tour des médias sociaux et des petits médias, les grands médias ont commencé à couvrir davantage ce qui s’était passé. À chaque nouvelle découverte d’un nouveau lieu dans un pensionnat, de plus en plus de Canadiens ont commencé à poser des questions, à chercher des réponses et à tendre la main aux peuples autochtones du Canada. Face à la pression croissante, les Canadiens se sont tournés vers le gouvernement pour qu’il réagisse.

Le 1er juillet, des centaines de milliers d’alliés canadiens ont marché avec les peuples autochtones à travers le Canada pour une journée de réflexion, envoyant au gouvernement le message que les Canadiens sont solidaires avec nous et veulent voir un changement.

En ce qui concerne la campagne électorale, nous ne sommes pas une organisation politique, mais je peux dire que nous avons vu les droits des autochtones pris en compte par certains partis plus que par d’autres. Quel que soit le parti au pouvoir, nous sommes toujours prêts et désireux de travailler avec lui concernant les efforts de réconciliation.

Quelle différence les récents actes de reconnaissance et d’excuses - tels que les excuses des évêques catholiques et la célébration de la Journée nationale de la vérité et de la réconciliation en septembre – ont-ils produit, et quelles mesures supplémentaires sont encore nécessaires ?

Nous sommes encouragés par les excuses des évêques catholiques et leur engagement à collecter des fonds pour les ressources des survivants et des organisations qui les servent. Cependant, nous attendons avec impatience que le Pape vienne au Canada pour s’excuser également et s’engager à soutenir les efforts de réconciliation.

Quels sont les principaux défis auxquels les peuples autochtones sont confrontés au Canada, et quels sont les obstacles à la réalisation des droits des peuples autochtones ?

Il y en a plusieurs, et ils varient d’un océan à l’autre, mais de nombreux droits humains fondamentaux doivent être respectés : l’accès à l’eau potable dans toutes les communautés autochtones d’un pays aussi riche que le Canada, la nécessité d’un financement équitable de l’éducation des enfants autochtones, la nécessité d’un financement équitable des services médicaux pour les peuples autochtones, la possibilité de vivre sans violence ou sans crainte d’être tué simplement parce que vous êtes autochtone, la possibilité d’exercer les droits issus de traités, la lutte contre les taux élevés de pauvreté et l’accès au développement économique, pour n’en citer que quelques-uns.

Nous avons connu sept générations de discrimination et d’injustice. J’espère qu’en travaillant avec les Canadiens, nous pourrons améliorer les choses pour les sept prochaines générations. Ainsi, lorsque nos descendants se pencheront sur les mesures que nous avons prises de notre vivant, ils verront que nous avons travaillé ensemble pour créer un avenir meilleur.

Quelles actions sont nécessaires pour faire progresser les droits des peuples autochtones, et quel soutien est nécessaire pour permettre ces actions ?

L’enseignement de l’histoire des peuples autochtones dans toutes les écoles, de la maternelle à la douzième année, d’une manière adaptée à l’âge des élèves, comme nous le faisons pour toutes les autres atrocités commises au cours de l’histoire, serait un moyen concret d’influencer les générations futures qui seront nos enseignants, nos médecins, nos politiciens, nos juges et nos décideurs, car cela aurait un impact considérable sur la manière dont les peuples autochtones seront traités à l’avenir. La Commission Vérité et Réconciliation a déjà présenté très clairement 94 appels à l’action qui permettraient de faire progresser de manière significative les droits des peuples autochtones. Il ne nous reste plus qu’à continuer à les mettre en œuvre.

L’espace civique au Canada est classé « ouvert » par le CIVICUS Monitor.
Prenez contact avec la Fondation Legacy of Hope sur son site web ou sa page Facebook, et suivez @legacyhopefound sur Twitter. 

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