Le Bénin baisse de catégorie tandis que les libertés civiques se dégradent

  • Persécution judiciaire des journalistes et militants
  • Les récentes élections législatives et présidentielles ont été émaillées de manifestations, de violences et de violations
  • Certains membres de l’opposition sont en détention ou en exil
  • C’est le cinquième pays d’Afrique de l’Ouest à descendre de catégorie dans les six derniers mois.

Le CIVICUS Monitor vient de déclasser le Bénin, qui descend de la catégorie d'«obstrué» à celle de «réprimé». Le CIVICUS Monitor est une plateforme numérique qui fait un suivi des violations des libertés civiques, notamment les libertés d'expression, d'association et de réunion dans tous les pays du monde. L'inclusion du Bénin dans la catégorie « réprimé » signifie que les libertés fondamentales y sont sérieusement restreintes.

« Des militants, des journalistes et des membres de l'opposition ont été menacés et persécutés », affirme John Gbenagnon, militant pour les droits de l'homme. « Le harcèlement par le biais d'arrestations arbitraires, de détentions, de l'utilisation ciblée de dispositions légales et réglementaires, et de restrictions financières est devenu une expérience habituelle pour de nombreux militants des droits de l’homme et membres de l'opposition au Bénin. »

Au Bénin les libertés démocratiques se sont détériorées sous le gouvernement du président Patrice Talon, récemment réélu en avril 2021 après une élection controversée, caractérisée par l'absence des principaux candidats de l'opposition.

De nombreux candidats de l'opposition ont été exclus de l'élection présidentielle après qu'une nouvelle loi électorale, adoptée en l'absence des partis d'opposition à l'Assemblée nationale, contraint les candidats à la présidence à obtenir le parrainage d'au moins un dixième des membres du Parlement ou des maires. Plusieurs membres de l'opposition ont été arrêtés au cours des derniers mois, tandis que d'autres restent en exil ou ont été disqualifiés et n’ont pas pu se présenter. L'exclusion des partis d'opposition des élections a déclenché des manifestations et des violences quelques jours avant le vote, une situation qui s'est soldée par au moins deux morts à Savè.

Le Monitor CIVICUS s’inquiète du fait que la détérioration des droits en période électorale au Bénin se banalise. Les élections législatives d'avril 2019 ont été entachées de violations de l'espace civique, notamment une coupure d'Internet et un usage excessif de la force, y compris de force létale, contre les manifestants. Les manifestations ont été interdites dans de nombreuses localités et des manifestants ont été arrêtés et détenus de manière arbitraire. Parmi les personnes arrêtées et poursuivies se trouvait le syndicaliste Joseph Aïmasse de la Confédération syndicale des travailleurs du Bénin. Il a été condamné le 1er avril 2019 à deux mois de prison et à une amende de 360 USD pour avoir appelé à une « manifestation non autorisée ».

Les arrestations et le ciblage de ceux qui ne partagent pas l'avis de l'État sont devenus plus fréquents au Bénin. Le Groupe de travail des Nations unies sur la détention arbitraire a récemment critiqué l'ambigu Code du numérique de 2018, qui est utilisé comme un outil pour arrêter et poursuivre les blogueurs, les journalistes et les membres de l'opposition. Au titre de cette loi, le célèbre journaliste d'investigation Ignace Sossou a été arrêté et condamné en décembre 2019 à une peine de prison initiale de dix-huit mois et à une amende ; il avait été accusé de « harcèlement par le biais d'une communication électronique » après avoir cité le procureur de la République sur Twitter lors d'un atelier pour les médias.

La liberté des médias est de plus en plus menacée au Bénin. La Haute Autorité de l'audiovisuel et de la communication (HAAC) a sanctionné arbitrairement des médias et des journalistes. Par exemple, en décembre 2019, lorsque Radio Soleil, propriété d'un dirigeant de l'opposition, a reçu l'ordre de « suspendre ses émissions » jusqu'à nouvel ordre, après que la HAAC a rejeté la demande de renouvellement de licence de la station.

En avril 2020, dans une démarche particulièrement régressive pour la justice, le Bénin s'est retiré de l'article 34-6 du Protocole de la Cour africaine des droits de l'homme et des peuples (CADHP), ce qui empêchera désormais les individus et les OSC de déposer des plaintes directement auprès de la Cour.

La dégradation de l'espace civique du Bénin reflète le déclin des libertés démocratiques dans toute l'Afrique de l'Ouest : la Côte d'Ivoire, la Guinée, le Niger et le Togo ont été déclassés et sont passés de la catégorie «obstrué» à celle de «réprimé» en décembre 2020, dessinant ainsi une tendance inquiétante dans la région. 

Ces cinq pays ont tenu des élections présidentielles en 2020 et 2021 qui, pour la plupart, ont été marquées par des controverses, des violations de l'espace civique et une tension politique accrue. En 2019 le Nigéria a intégré la catégorie «réprimé», un an après que le Sénégal a également vu son classement se dégrader, passant de la catégorie « rétréci » à celle d'«obstrué».


CLASSIFICATIONS DE L'ESPACE CIVIQUE PAR LE CIVICUS MONITOR

 OUVERT RÉTRÉCI OBSTRUÉ  RÉPRIMÉ FERMÉ

 


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